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Le paiement des traducteur·rices et interprètes juré·es : une question toujours en suspens

Question parlementaire orale du député Alain Yzermans à la Ministre de la Justice Annelies Verlinden sur "Le paiement des traducteurs-interprètes".
(La Chambre des Représentants de Belgique, Commission de la Justice du 26-02-2025).

Lors d’une récente session parlementaire, le député Alain Yzermans (Vooruit) a interpellé la ministre de la Justice, Annelies Verlinden, sur la question récurrente du paiement des traducteur·rices et interprètes juré·es. 

Vous pouvez visionner la vidéo ici.

Malgré des engagements pris en septembre 2024 et des propositions de solutions, de nombreux·ses professionnel·les se retrouvent une fois de plus confronté·es à des retards de paiement.

Le député a souligné que les difficultés de paiement poussent de plus en plus de traducteur·rices et interprètes à se détourner de la justice. Cette situation impacte directement le bon fonctionnement des tribunaux et des services judiciaires. Il a également mis en avant un autre problème : les postes vacants au sein des bureaux de taxation ne sont pas tous pourvus, ce qui ralentit le traitement des frais de justice et aggrave l’accumulation des arriérés.

Autre point critique : les traducteur·rices inscrit·es au registre définitif ont payé leur contribution pour 2024, mais attendent toujours leur rémunération. Face à cette situation, combien d’interprètes restent encore impayé·es depuis l’été dernier ? Quelles solutions concrètes le ministère met-il en place pour résorber ces retards ?

Des mesures annoncées pour fluidifier le processus

Dans sa réponse, la ministre Annelies Verlinden a affirmé attacher une grande importance au paiement des frais de justice dans les délais et a reconnu la nécessité d’une coopération efficace avec les expert·es judiciaires. Elle a précisé qu’un rattrapage significatif avait été effectué fin 2024, permettant de payer tous les états de frais validés avant le 19 décembre.

Cependant, 500 frais datant d’après août 2024 restent encore bloqués, affectant environ 260 traducteur·rices et/ou interprètes juré·es. Ces paiements seraient en attente en raison de dossiers incomplets, de l’absence de pièces justificatives ou d’une soumission tardive. Pour résoudre ce problème, la ministre a demandé au SPF Justice d’accélérer la correction et le traitement des états de frais.

Nous supposons d’ailleurs que les chiffres avancés ne concernent que les états de frais déjà traités par les bureaux de taxation mais non encore payés, et que les arriérés de paiement réels sont, sans aucun doute, bien plus élevés.

Afin d’améliorer la gestion des paiements, du personnel supplémentaire a été engagé dans les bureaux de taxation. Actuellement, sur 96 postes vacants, 79 ont été pourvus, et les nouvelles recrues sont en formation. Toutefois, 17 postes restent à pourvoir, dont un au bureau de taxation d’Eupen pour un·e collaborateur·rice germanophone.

En parallèle, des efforts seront déployés pour numériser davantage le traitement des frais de justice. Un couplage entre les applications CGAB et JustInvoice est en cours afin de fluidifier les paiements. La ministre encourage vivement les expert·es judiciaires à utiliser JustInvoice, un outil censé simplifier le codage, le contrôle et le suivi des paiements, garantissant un traitement plus rapide des dossiers.

Lors de son discours marquant les 10 ans de l’UPTIJ, la ministre avait déjà abordé cette problématique et y a fait référence dans sa réponse parlementaire. Nous vous communiquerons très prochainement tous les détails de son intervention lors de notre célébration.

Vers une amélioration durable ?

Si ces annonces vont dans le bon sens, les traducteur·rices et interprètes restent vigilant·es quant à la mise en œuvre effective de ces mesures. Comme l’a rappelé le député Yzermans, il est essentiel que ces professionnel·les puissent exercer leur mission dans des conditions financières dignes et prévisibles. Un système où les expert·es cessent de travailler faute de paiement met en péril la justice elle-même.

Le dossier reste donc sous surveillance, et nous ne manquerons pas d’en suivre l’évolution.

Vous trouverez l'intégralité de la question et de la réponse ici :

Question de Alain Yzermans à Annelies Verlinden sur "Le paiement des traducteurs-interprètes"

16.01 Alain Yzermans (Vooruit): Madame la Ministre, Les interprètes et traducteurs se détournent progressivement de la justice en raison de difficultés de paiement. Cette question a été soulevée à plusieurs reprises au cours des deux dernières années. En septembre 2024, plusieurs solutions ont été proposées, mais aujourd’hui, les interprètes et traducteurs sont confrontés à un nouveau problème et doivent, une fois de plus, attendre leur rémunération. Comment comptez-vous y remédier ?

De plus, tous les postes vacants au sein des services d'évaluation n'ont pas été pourvus. Nous entrons progressivement dans un cercle vicieux d'arriérés structurels. Dans certains cas, des interprètes refusent d’intervenir faute de paiement. Cela nuit au fonctionnement du système judiciaire.

Les traducteurs inscrits au registre définitif ont payé leur cotisation l'année dernière, mais attendent toujours leur rémunération.

Nous avons déjà abordé ce sujet à plusieurs reprises, mais nous posons à nouveau nos questions. Quels sont les moyens disponibles ? Que fait le ministère de la Justice pour résorber l'arriéré ? Combien d'interprètes n'ont pas encore été payés pour leurs prestations depuis l'été dernier ?

16.02 Annelies Verlinden, ministre (en néerlandais): Le SPF Justice, tout comme moi-même, accordons une grande importance au paiement dans les délais des frais de justice, en particulier des états de frais des interprètes, traducteurs et traducteurs-interprètes. Le bon déroulement d’une procédure judiciaire repose sur une coopération efficace avec les experts judiciaires, ce qui implique évidemment le règlement ponctuel de leurs factures et états de frais.

Lors de la clôture de l'exercice comptable 2024, le SPF a effectué un rattrapage significatif dans le paiement des états de frais des interprètes, traducteurs et traducteurs-interprètes. Tous les états de frais qui avaient été contrôlés et validés au 19 décembre ont été réglés à cette même date. Ceux qui ont été codés fin 2024, mais qui ne pouvaient plus être liquidés avec le budget 2024, ont depuis été payés sur le budget 2025.

Sur la base des données disponibles dans l'application comptable CGAB, 500 frais datant d'après août 2024 seraient encore bloqués à ce jour, affectant environ 260 traducteurs et/ou interprètes jurés. Il s'agit d'états de frais qui n'ont pas été correctement remplis, qui ne sont pas accompagnés des pièces justificatives requises ou qui ont été introduits trop tardivement. Ils n'ont pas encore été payés, car ils n'ont pas été soumis conformément aux prescriptions légales.

J’ai enjoint le SPF Justice à demander, dans les plus brefs délais, la correction des états de frais concernés et à en accélérer le traitement ainsi que le paiement.

Du personnel supplémentaire a été engagé dans les bureaux de taxation afin d’accélérer le traitement des frais de justice. Sur les 96 postes vacants, 79 ont déjà été pourvus et les nouvelles recrues sont actuellement en formation. Il reste encore 17 postes à pourvoir, dont un pour un collaborateur germanophone au bureau de taxation d’Eupen.

Par ailleurs, des efforts seront déployés pour améliorer le support numérique du traitement des frais de justice, notamment en établissant un lien entre CGAB et JustInvoice. De nombreux experts judiciaires continuent d’utiliser l’ancienne application CGAB pour soumettre leurs états de frais et factures, alors que la nouvelle application JustInvoice permet un traitement bien plus fluide.

C’est pourquoi j’encourage vivement les experts – et je l’ai déjà fait vendredi dernier auprès de l’Union professionnelle des interprètes et traducteurs jurés, ainsi qu’auprès des experts judiciaires – à introduire leurs notes de frais via JustInvoice, le nouveau système. Cela facilitera le codage, le contrôle et le suivi, garantissant ainsi un paiement plus rapide.

16.03 Alain Yzermans (Vooruit): Je me réjouis d'apprendre que vous vous efforcez d'accélérer le déroulement de la procédure, notamment grâce à l'introduction de nouvelles techniques, principalement dans le domaine administratif. Il me semble essentiel que les interprètes puissent exercer leur mission dans l'intérêt de la justice, y compris pour assister efficacement les magistrats.

Nous devons briser ce cercle vicieux : un système dans lequel des professionnels non rémunérés finissent par se désengager n’envoie pas un signal positif et ne contribue pas à une justice diligente.

Nous attendons donc ces améliorations avec impatience et nous nous en réjouissons. Nous continuerons à suivre ce dossier.

L'incident est clos.

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